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 L’apport de la culture amazighe

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aureschaouia

aureschaouia


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Date d'inscription : 17/10/2004

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MessageSujet: L’apport de la culture amazighe   L’apport de la culture amazighe Icon_minitimeMer 19 Nov - 23:52

DENTITÉ NATIONALE - L’apport de la culture amazighe



in : http://www.lexpressiondz.com/article/8/2008-11-20/58063.html


L’apport de la culture amazighe TP081120-07

Le mausolée royal, Medracen à Batna, plusieurs fois millénaire

«Homo sum; humani nil a me alienum puto»: «Je suis un homme et rien de ce qui est humain, je crois, ne m’est étrange» Térence, écrivain berbère

Il peut sembler être une gageure que de parler de la culture amazighe tant les matériaux sont dispersés et les études rares. L’Afrique et plus précisément le Maghreb actuel des nations avec les attributs des Etats, où Massinissa battait monnaie, ont vu naître des hommes illustres qui ont permis le rayonnement d’une culture authentique qui a beaucoup emprunté aux cultures des occupants de passage. Apulée et saint Augustin s’exprimaient en latin mais pensaient en Amazighs. Plus tard, avec la venue de l’Islam, les érudits écrivaient dans la langue liturgique qu’était l’arabe. Bien plus tard, ce fut le français avec, pour certains, notamment les poètes, une expression linguistique purement amazighe.(1) La diversité des expressions des hommes de culture et de lettres dépasse, on l’aura compris, le cadre étroit de la géographie des Etats. Il ne sera pas possible d’être exhaustif tant la variété des écrits est importante et tant aussi, de nombreux écrits ne furent pas sauvés de l’oubli. Nous tenterons, modestement, de rapporter quelques faits qui font l’unanimité concernant cette culture amazighe, qui n’est le monopole de personne mais, qui devrait être, de notre point de vue, la préoccupation de tous.
Les premiers peuples qui ont vécu en Algérie ne se sont pas tous installés à la même période. Certains auteurs, comme Arembourg, font reculer les premiers peuplements aux origines mêmes de l’humanité (ancien lac de Sétif à Aïn Hanech). Comme l’écrit Hachid: «A cette époque, l’Atlas entrait dans le cadre de la Berbérie présaharienne, pays des Gétules, plus nomades que sédentaires, plus africains que méditerranéens. Les gravures rupestres reflètent ces turbulents cavaliers aux chevaux piaffants, échappant à la puissance même de Massinissa.»(2)

L’empreinte amazighe des noms et des lieux
Le néolithique au nord, est relativement récent, au sud, il est plus ancien (7.000-9000 ans avant J.C.). C’est dans le Sahara que se situe son apogée. C’est là, nous dit Kaddache, que sont apparus des outils perfectionnés: pierres polies, pointes de flèches et un art inestimable: gravures et peintures. Les «El hadjera El mektouba» (gravures rupestres), outre leur intérêt artistique, nous renseignent sur la faune (éléphants, antilopes, lions, girafes, autruches, béliers),costume, les bijoux et les armes utilisés par l’homme de cette époque.(3) D’autre part, de nombreux monuments funéraires avec de nombreux ex-voto comme les stèles peintes de Djorf Torba, laissent entrevoir de véritables cultes témoins de l’inquiétude de l’homme en face de sa destinée. L’importance de la concentration rupestre de l’Atlas saharien s’étend sur près de 700km, avec plus de 300 sites, sans compter le parc grandiose du Tassili, ce qui conduit objectivement à admettre qu’il existait bien une culture et un savoir plusieurs fois millénaire.
S’agissant de l’origine des Berbères, pour le regretté professeur Mahfoud Kaddache, on peut considérer qu’en Algérie, les Berbères tirent leurs origines de Mechta El Arbi et des Préméditerranéens. Il est certain qu’au cours des temps néolithiques et historiques, des brassages, des mélanges ethniques ont affecté des populations berbères. Certaines populations ont fusionné avec les indigènes, sur une période de plus de trente siècles. Ce sont d’abord les Phéniciens au XIIe siècle avant Jésus-Christ et ceci, notamment, sur la bande côtière, principalement dans l’est.Il y eut ensuite pendant près de cinq siècles et demi, la venue des Romains, jusqu’à la moitié du cinquième siècle, les Vandales et les Byzantins, et enfin les Arabes dès la fin du VIIe siècle et les Turcs au XVe siècle. Les inscriptions libyques témoignent de l’ancienne langue parlée. Lorsque les Berbères émergent de l’histoire, ils sont déjà un peuple, une langue, des royaumes. Dès lors, se tourner vers l’archéologie, cette bibliothèque des âges anciens est une nécessité. A titre d’exemple, l’image du char, montre que l’Afrique du Nord, n’est pas restée en marge de la «charrerie» méditerranéenne.(2) Il a fallu attendre le tournant décisif avec Marcel Cohen qui intègre le berbère dans une grande famille chamito-sémitique au même titre que le sémitique, le couchitique, l’égyptien.
S’agissant de la culture et des savoirs berbères depuis la plus haute antiquité, deux exemples parmi tant d’autres ont été rapportés par le professeur Belkadi pour nous convaincre de l’existence d’une science et d’une culture à ces autochtones à qui la science coloniale a dénié toute légitimité culturelle et scientifique. Sans remonter en l’an 950 av. J.-C. qui serait l’année de l’accession au statut de Pharaon d’Égypte d’un Berbère qui fondera la XXIIème dynastie sous le nom de Chéchonq Ier. Le professeur Belkadi écrit: La propension au savoir rationnel et universel est attestée en Algérie, il y a 7000 ans, durant l’ère néolithique dite de tradition capsienne, bien avant l’apparition des civilisations de Sumer, de Akkad ou celle de l’Egypte. Le site de Faïd Souar II, situé à 70km au sud-est de Constantine, a fourni en 1954 un crâne d’homo sapiens -ancêtre direct de l’homme moderne- dont le maxillaire dévoilait une prothèse dentaire. Cette originalité préhistorique annonciatrice de l’orthodontie est la seule du genre connue à ce jour dans le monde. (..) La mâchoire a subi l’avulsion de quatre incisives, selon l’usage bien établi chez les hommes d’Afalou-bou-Rhummel. La deuxième prémolaire supérieure droite de la femme préhistorique de Faïd Souar, a été remplacée par un élément dentaire fabriqué à partir de l’os d’une phalange qui a été finement taillé et lissé avant d’être réuni à l’alvéole. Ce qui lui donne l’apparence irréprochable d’une couronne dentaire conforme aux dents voisines.(..) La radiographie montre une grande proximité entre la paroi alvéolaire radiculaire du crâne et l’implant préhistorique. «Quelle précision dans ce travail pour ne pas faire éclater l’os!», écrivent Jean Granat et Jean-Louis Heim du Musée de l’homme à Paris, qui ajoutent: «Alors, les tentatives de greffes osseuses ou d’implantologie, réalisées par ce praticien d’alors, auraient 7000 ans!(...)» Et pourtant c’est ce peuple qu’E.F.Gautier méprise: «Le Maghrébin, parmi les races blanches méditerranéennes, représente assurément le traînard resté loin en arrière, cette race n’a aucune individualité positive.»
Par ailleurs, par un argumentaire à la fois captivant et scientifique, le professeur Belkadi nous convainc qu’il y avait bien une culture berbère plus de 9 siècles avant J.-C., en tout cas antérieure à la venue des Phéniciens. «Selon nous, poursuit le professeur Belkadi, la plus ancienne trace parlée de la langue berbère remonte au VIIIe siècle avant J.-C. Elle figure dans le sobriquet Dido, qui fut attribué à la reine phénicienne Elissa-Elisha par les anciens Berbères de la côte tunisienne. Ce surnom, Dido, qui sera transcrit par la suite Didon, replacé dans le cadre du système morpho-syntaxique berbère, est un dérivé nominal de sa racine Ddu, qui signifie: ´´marcher´´, ´´cheminer´´, ´´flâner´´, ´´errer´´. Il indique dans les parlers berbères de nos jours, la ´´pérégrination´´, synonyme de voyage, et de périple. En conséquence, la plus ancienne trace de la langue des Berbères remonte à l’arrivée de cette reine sur le rivage tunisien. Ce pseudonyme ne figure pas dans l’anthroponymie et l’épigraphie funéraire des Puniques. Certainement parce qu’il était jugé dévalorisant. Le sens Tin Ed Yeddun ´´l’errante´´, ´´celle qui erre´´, et ses passim ´´vadrouiller´´, ´´vagabonder´´, Eddu appliqué à cette reine ne convenant pas à la société punique». Le professeur Belkadi nous apprend aussi que le youyou berbère n’est pas de création récente ou une tradition importée, ce «fait culturel» a été rapporté sous le nom de «ologougmos» par Eschyle et Hérédote qui vécurent, faut-il le rappeler au sixième et au cinquième siècle avant Jésus-Christ (-526) et (-482).(4)

La fierté d’être Algérien
Il est indéniable qu’il y avait un fond culturel de type berbère et qui a bien traversé le temps, malgré les vicissitudes de l’histoire, jusqu’à nos jours. En battant monnaie, les rois berbères ont témoigné de leur fascination pour les valeurs des cultures et des civilisations dominantes. Cependant, les Berbères pour s’affirmer, ont toujours utilisé- à de rares exceptions- les langues des conquérants, successivement le punique, le latin, l’arabe et le français. Cependant, l’apport de la nouvelle langue n’a pas réduit ou même annihilé les coutumes locales et la langue primitive. Mohammed Ben Abdallah Ibn Toumert, fondateur de la dynastie almohade a traduisit en berbère des ouvrages qu’il avait composés lui-même en arabe. Une partie de la Bérbérie a, par la force des choses, adopté les moeurs et les coutumes du vainqueur, en l’occurrence: Rome. Le cas le plus connu est celui de Juba II, élevé à la cour de Rome et qui comme nous le verrons, laissera son nom dans l’histoire, plus, comme homme de lettres et de science qu’en tant que roi. Bien avant l’ère chrétienne, il y eut des écrivains berbères qui écrivaient en latin. Parmi les auteurs, certains étaient païens comme Fronton et Apulée de Madaure qui écrivit l’Apologie Certains écrivains furent de redoutables orateurs, Tertullien, Lactance, et surtout saint Augustin surnommé à juste titre le Père de l’Eglise. Il naquit à Thagaste, (Souk Ahras). Sa mission, il la concevait à côté des déshérités. L’oeuvre littéraire de saint Augustin est féconde; deux ouvrages émergent La cité de Dieu, oeuvre dans laquelle il oppose la vanité des cités terrestres à la cité éternelle de Dieu. Les confessions, oeuvre autobiographique pleine de doutes, d’interrogations et d’espoirs.
Pour témoigner de la présence des parles berbères dans l’histoire de l’Algérie depuis près de trente siècles, nous allons rapporter le témoignage, celui du regretté professeur Mostefa Lacheraf qui parle avec autorité et respect du gisement ancien en langue amazighe: «Des noms et des lieux: revenons-y alors que l’ignorance chez nous bat son plein au sujet de ce pays, de ses noms et pas seulement au niveau d’un état civil désastreux mais aussi à travers le choix des parents saisis par des mimétismes orientaux, occidentaux et rarement maghrébins. Noms berbères anciens et berbères punicisés par l’attrait culturel de Carthage. Noms berbères arabes berbérisés ou greffés d’amazigh.» Mostefa Lacheraf décrit ce que l’on pourrait appeler l’acculturation croisée, il écrit: «(...) Mais l’un des prénoms, les plus significatifs de l’osmose qui a opéré au plan sémantique des usages et d’une certaine propriété des termes entre le berbère et l’arabe dialectal au point de constituer des algérianismes (comme on parlerait de gallicismes ou d’anglicismes) est certainement le «décalque» à propos d’un nom célèbre, rencontré dans l’une ou l’autre des langues. (...) Ainsi Massinissa (Massiissen) nom propre berbère qui signifie: le plus grand des hommes, le plus élevé par le rang, le Seigneur des hommes, etc, a trouvé dans l’onosmatique arabe algérienne dans le passé et jusqu’à ce jour, son juste équivalent et ses variantes sous les formes suivantes: ‘Alannàs, Sidhoum,’Aliennàs, ‘Alàhoum; et dans le genre le nom très connu de Lallàhoum «Leur dame», celle qui est supérieure aux autres, hommes et femmes.(5)
Pour nous permettre d’évaluer à sa juste mesure, l’empreinte séculaire du fond berbère, suivons aussi Mostefa Lacheraf qui parle d’un «gisement» ancien en langue amazighe. Il écrit: Dans l’épigraphie nord-africaine à laquelle se réfère Gustave Mercier à propos de ce qu’il appelait en 1924 «La langue libyenne (c’est-à-dire tamazight) et la toponymie antique de l’Afrique du Nord», des noms propres d’hommes et de femmes surgissent et parmi eux, il en est de moins reconnaissables comme ce Tascure, découvert gravé en latin et dont les doublets linguistiques actuels sont Tassekkurt et Sekkoura signifiant «perdrix» en kabyle. «Les topiques ou toponymes et lieudits à travers toute l’Afrique du Nord constituent, quant à eux, un véritable festival de la langue berbère, et l’on bute sur ses noms devenus familiers aux vieilles générations d’Algériens connaissant leurs pays dans les moindres recoins du sous-continent maghrébin avec ses montagnes, ses coteaux, ses cols, défilés et autres. (...) Bref, un inventaire grandiose ou infinitésimal, un espace géographique modelé par les millénaires et s’exprimant en tamazight, la nature et les hommes confondus! Ne serait- ce que pour cela (qui est déjà énorme) cette langue devrait être enseignée à tous les enfants algériens afin de leur permettre de redécouvrir leur pays dans le détail et non par le biais de l’abstraction idéologique imposée au nom de la qawmiyya baâtiste et faisant de l’école une institution étrangère, sinon à notre identité proclamée en surface du moins, à notre être national véridique, fruit intime de la géographie et de l’histoire toutes deux conçues charnellement à partir du terrain et assumées comme telles sans détour ni mensonge. La pédagogie scolaire et de l’enseignement supérieur, en transposant à son niveau, avec des moyens appropriés, cette légitime initiation à la terre, à la faune, à la flore aux mille réalités concrètes (et méconnues) du Maghreb, fera gagner à notre identité en débat perpétuel injuste, les certitudes dont elle a besoin pour s’affirmer et s’épanouir». «(..) Et il y en a qui veulent nous ajouter d’autres tutelles sous formes d’influences inesthétiques et d’autres n’ayant rien de maghrébin, parfois manifestement anti-algériennes, oublieuses de nos épreuves, de nos acquis, de notre culture écrite et populaire de double expression berbère et arabe!»(5)
En définitive dit autrement et avec beaucoup moins d’élégance, il faut arriver à redonner à l’Algérien cette fierté d’être algérien et réconcilier ce peuple avec lui-même; prôner en toute chose l’altérité. Ne voulant pas d’une autre patrie de rechange, il nous faut inventer un modus vivendi loin du miroir aux alouettes constitué par un mode de vie à l’européenne, débridée, loin de notre identité et loin aussi d’une métropole moyen-orientale qui est à des années- lumières de notre génie propre. A sa façon, Cheikh Nahnah parlait de ce désir d’être ensemble: «Min ta latta de Tamanrasset à Tizi ouzou et de Tlemcen à Tébessa.» Il a mille fois raison. Une culture assumée, revendiquée est le plus sûr moyen de lutter contre l’errance identitaire.

(*) Ecole nationale polytechnique

1.C.E.Chitour L’apport culturel de la culture amazighe Colloque HCA Alger 12 11 2008
2.M.Hachid: El hadjra el Mektouba:les pierres écrites de l’Atlas saharien.Ed. Enag. 1993
3.M.Kaddache. L’Algérie dans l’Antiquité. p.20.Editions Enal.Alger, 1992
4.Ali Farid Belkadi: A propos du youyou traditionnel Colloque Cread: Quels savoirs pour quelles sociétés dans un monde globalisé?
Alger 8-11 novembre. 2007
5.Mostefa Lacheraf: Des noms et des lieux. Editions Casbah..2004

Pr Chems Eddine CHITOUR (*)
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